Nous devons avouer que nous ne savons pas grand-chose sur les premières années qui ont suivi la naissance de Michel Nostradamus. Cependant, nous disposons de divers écrits qui vont nous permettre de tracer l’itinéraire probable du futur médecin et prophète.

La naissance d'un prophète
(1503 - 1515)


    Nous sommes en pleine renaissance. Comme pour annoncer un destin hors du commun, de grand changements viennent de s’opérer un peu avant le début du XVIe siècle : on découvre de nouvelles terres par delà les océans et l'imprimerie naissante se développe considérablement.

   A contrario, nous sommes bien dans un siècle de superstitions où les apparitions insolites dans le ciel sont fréquentes. Quant à l’interprétation de ces présages inscrits dans la nature, elle est le plus souvent inquiétante.

   La petite ville de Saint-Rémy-de-Provence, entourée par la chaîne des Alpilles, est un bien curieux village du Midi de la France. On peut, en effet, y découvrir les restes d'une vieille citée gallo-romaine, elle-même construite sous les ruines grecques de la Cité des Glaniques. Il en subsiste deux monuments que les habitants ont toujours appeler les « Antiques » : le Mausolée de Glanum et l’Arc municipal . Derrière ces antiquités gallo-romaines s’élevait la chaîne des Alpilles que, trois siècles plus tard, un Frédéric Mistral baptisera le « Lion d’Arles ».

   Le lecteur trouvera de plus amples informations sur la célèbre Glanum dans la savante notice archéologique de Henri Rolland : Glanum, St Rémy, 1954.

   Le fils d'un marchand de fourrages et de céréales, Jaume de Nostredame, a une charge de notaire dans cette ville. Sa femme Reynière vient de mettre au monde un adorable bambin, ce 14 décembre de l’an 1503.

   Dans son Bref discours sur la vie de Nostradamus, Jean-Aimé de Chavigny précise, sans doute pour des raisons astrologiques, que la naissance de son maître eut lieu « environ les 12 heures de midi » ! Michel est ainsi né sous le règne de Louis XII et sous le pontificat de Jules II, au solstice d'hiver quand le soleil passait dans le Capricorne.

   La naissance de ce premier enfant, prénommé Michel, apporte beaucoup de joie dans la demeure de la rue du Viguier où vivent les jeunes mariés aux côtés du grand-père de Reynière, Jean de St-Rémy et de la grand-mère, prénommée Silette.

   Quelques jours plus tard, on baptise l’enfant dans l’église paroissiale de Saint-Rémy-de-Provence. Le brave curé de l'endroit qui accueille ce nouveau petit chrétien ne se doute pas qu'il va baptiser le futur auteur du plus énigmatique ouvrage jamais conçu : les Centuries, et que un demi millénaire plus tard, on en parlerait encore !

   Si nous en croyons Jean de Nostredame, frère de Michel, ce dernier « fut en sa jeunesse enclin aux vices », lisons-nous dans un manuscrit de la Bibliothèque Inguimbertine.

   Les livres écrits pour les écoliers du XVIe siècle montrent que les élèves apprenaient non seulement à lire, à écrire et le vocabulaire latin, mais également des leçons de civilité, matière qui se fait cruellement sentir par son absence de nos jours.

   L’enseignement du latin était indispensable. Il fallait pouvoir dire correctement l’office de la liturgie chrétienne et le chanter. C’était un enseignement surtout oral qui faisait appel à la mémoire. Les élèves reprenaient ensemble et psalmodiaient les prières donnée par le maître. Ils répétaient le même exercice jusqu'à ce qu’ils l’aient retenu par cœur, un peu comme les jeunes musulmans le font dans les écoles coraniques ou telles les récitations talmudiques dans les écoles rabbiniques : la lecture était un support qui aidait considérablement les mémoires défaillantes.

   Il n’y avait pas d’enseignement élémentaire tel que nous le concevons aujourd’hui, et correspondant à notre premier degré. La lecture, l’écriture et l’usage du français ne faisaient pas l’objet d’un enseignement scolaire ; on apprenait ces matières fondamentales dans sa famille.

   Puis Michel a sans doute suivi les cours du maître d’école de la communauté de Saint-Rémy. En général, le même maître enseignait tous les Arts, tel l’instituteur de nos classes primaires actuelles : c’était le régent.

   Lorsque l’enfant se libérait de l’emprise de sa mère ou de sa nourrice, il devenait adulte et était considéré comme tel.

   En devenant notaire, la situation de famille de Jaume de Nostredame s’améliora, et en octobre 1511, le père de Nostradamus se commande tout un mobilier.

   Michel était assez grand pour comprendre que la conversion au catholicisme ne suffisait pas pour faire des membres de sa famille des chrétiens à part entière. Et il devait mal supporter que ses camarades de jeu le traitaient parfois de « retaillon », surtout après la taxe payée par les anciens Juifs de Provence en 1512 : son père Jaume de Nostredame figurait parmi les trois cotisants de la ville de Saint-Rémy.

   Ce terme injurieux et vexant de « retaillon », à l'endroit des Juifs de Provence qui avaient choisi le baptême, amena le Parlement d’Aix à prendre un arrêt en mai 1542 condamnant toute personne qui utiliserait ce mot.

 

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