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ANALYSE

49

Indices de contrefaçon de la Préface à César

par Jacques Halbronn

 

Sommaire :

1 - La Préface à César et l’an 1727, au regard de l'exégèse nostradamique (1594 - 1710)
2 - La Préface à César, Nostradamus et la comète de 1556
3 - Du mode de fabrication des Centuries ignées
4 - Date de publication de l’Epître contrefaite à César de Nostredame


1

La Préface à César et l’an 1727,
au regard de l'exégèse nostradamique (1594 - 1710)

    Les questions qui se posent actuellement concernant l’oeuvre de Michel de Nostredame se posaient déjà, il y a deux cents ans, à la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle, soit à la fin du règne de Louis XIV et sous la Régence, chez un Guynaud, chez un Le Roux, aboutissant aux considérations parues, en 1724, dans le Mercure de France.1 Au demeurant, cette période était apparemment en ligne de mire de certains calculs figurant dans la littérature nostradamique comme le rappellent certains interprètes. Car peut-on interpréter Nostradamus sans se demander ce qui est et n’est pas de lui ? Tout cela pour dire que les questionnements propres aux auteurs de cette époque rencontrent en nous une certaine résonance. En quoi leur approche différait-elle de la nôtre, en quoi nous est-elle de quelque enseignement, c’est ce que nous allons tenter de préciser. Notre corpus sera constitué de deux ouvrages, l’un paru en 1693 de B. Guynaud, qui connut de nombreuses éditions, il s’agit de la Concordance des Prophéties de Nostradamus, et dont il existe un manuscrit partiel à la Bibliothèque de l’Institut, Paris, l’autre datant de 1710, la Clef de Nostradamus.

   On notera ainsi, d’entrée de jeu, que dans un ouvrage plus ancien mais largement cité par nos auteurs, à savoir l’Eclaircissement des véritables quatrains de Maistre Michel Nostradamus de 1656, il n’est signalé aucune date d’édition des Centuries. Certes, on y mentionne les dates des épîtres mais sans aucunement indiquer qu’il s’agit là de dates d’édition. Il semble que le préfacier de cet ouvrage, se serve d’une étude biographique d’origine, parue, selon nous, peu après la mort de MDN2 ; les textes cités sont les suivants :

   “Un livre de singulières receptes pour la santé du corps humain, imprimées à Poictiers, l’an 1556.
Un autre sur les moyens de conserver le teint frais du visage, l’embellissement de la face & le corps en son entier. Ce qui fut imprimé chez Plantin à Anvers, l’an 1557.
Il traduisit de Latin en François la paraphrase de Galien sur l’exhortation de Menodote etc, pièce qui fut imprimée chez Antoine du Rhosne l’an 1557, à Lyon.”

   La liste s’arrête là. On n’y a pas inséré d’édition Macé Bonhomme ou Antoine du Rosne des Centuries, ce dernier étant cité pour un texte d’un autre ordre mais pour la même année 1557 qui est celle de certaines éditions (antidatées) des Centuries, les premières comportant les sept premières séries (dont une centurie VII incomplète).

   En revanche, les auteurs de la fin du siècle ne se gêneront plus pour mentionner des éditions des Centuries du vivant de l’auteur, sur la base de certaines Epîtres et en cela ils sont les précurseurs de bien des nostradamologues actuels.3

   L’Eclaircissement va jusqu’à rejeter (p. 70) la totalité des Présages, puisqu’on y soupçonne les publications annuelles d’être des faux :

   “Du nombre de quatrains de l’auteur, il en faut premièrement retrancher tous ceux que l’on a imprimé sur diverses années en forme d’almanachs : scavoir est ceux que l’on trouve sur l’an 1555 & sur les années qui sont depuis l’an 1557 iusques à l’an 1566 où il mourut, parce qu’ils sont douteux & sentent au levain de ces faux Almanachs, lesquels on débitoit sous la réputation de son nom afin d’estre mieux vendus etc.”

   Là encore, les auteurs de la fin du XVIIe siècle ne suivront pas l’exemple de l’Eclaircissement, lequel rejette (pp. 70 et seq) également les sixains, point de vue qui finira par s’imposer et explique la défaveur des éditions troyennes à présages de nos jours, en dépit de l’usage qu’en fit le Janus Gallicus, la grande somme exégétique avant l’Eclaircissement, paru au demeurant très partiellement : il en existe un manuscrit plus ample, aux Archives Nationales, Paris.

   Que faut-il penser du passage suivant de la Concordance de Guynaud : “Pour se débarrasser tout d’un coup de l’importunité de tant de gens, ce grand Homme s’avisa de faire un petit livre intitulé : l’Almanach de Nostradamus où le peuple était averti de ce qui arriveroit de plus remarquable dans tous les mois de l’année. Il rencontroit si bien dans tout ce qu’il prédisait que les Imprimeurs n’en pouvaient point assez faire, tant le débit en étoit grand” (p. 14) ? Au premier abord, on pourrait penser qu’il est ici fait référence aux almanachs annuels mais ne pourrait-il plutôt s’agir de Prophéties Perpétuelles, un ouvrage ne se démodant pas au bout d’un an et utilisable indéfiniment.4

   Le terme présages n’est nullement, chez un Guynaud5, réservé aux quatrains des almanachs : “Il y a très grande apparence qu’avant les années 1555 & 1558 (MDN) avait mis au jour un petit livre de Présages qu’il avait faits sur des choses particulières qui commençait environ l’année 1550 & finissait en 1597”. On nous renvoie à la Préface à César qui mentionne d’ “autres prophéties qui sont composées in soluta oratione”, la formule latine impliquant qu’il s’agit de prose.

   Dans la Clef, Le Roux est formel (p. 50) : “Il n’y a si petit Ecolier de Troisième, qui ne sçache que stricta oratio veut dire des vers & soluta oratio de la prose”. Le Roux récuse donc Guynaud qui y voit un renvoi aux quatrains des almanachs. En fait, nous venons de le montrer, ces quatrains des almanachs sont inclus au sein d’un ensemble en prose. Mais ce qui est pour le moins étrange, c’est que l’on fait dire à MDN, dès 1555, qu’il a composé un ensemble qui n’existe pas encore, si l’on admet qu’il est constitué, comme c’est le cas du RPP, de publications annuelles qui se succéderont douze années durant, jusqu’à celles concernant l’an 1567. Nous y voyons une bévue des faussaires remaniant l’Epître à César, ce qui explique que Guynaud (cf. supra) ait pu supposer “qu’avant les années 1555 & 1558 (MDN) avait mis au jour un petit livre de Présages qu’il avait faits sur des choses particulières qui commençait environ l’année 1550 & finissait en 1597” ou encore “il faut sçavoir que cet Oracle de France (avait) d’abord publié un Livre de Présages dès l’an 1550 pour durer jusqu’en 1597.”6

   Or, dans le Brief Discours, il est question de “présages en prose faits depuis l’an 1550 iusques à 67” et non jusqu’en 1597 ! Cette date de 1597 ne semble figurer que dans l’Epître à Henri IV de 1605 : “ce petit livret, non moins digne & admirable que les autres deux Livres qu’il fit, dont le dernier finit en l’an mil cinq cens nonante sept, traictant de ce qui adviendra en se (sic) siècle, non si obscurément comme il avoit fait les premières etc.” On se demande d’où Scève tire cette information sur 1597. Signalons cependant le 101e quatrain de la Centurie X, constitué par un cryptogramme visant l’année 1593 et qui figurait probablement dans l’édition perdue dont s’est servi le Janus Gallicus :

Lors qu’un fourchu appuyé sur deux paux
Et l’arc tendu & neuf ciseaux ouverts
Trois paux suyvis, le grand Roy des crapaux
Ses ennemis mettra ius à l’envers.

   Or, si le deuxième livret - comme il apparaît dans les diverses éditions - correspond aux centuries VIII - X, ce quatrain conclut l’ensemble - se présentant comme ajouté à l’édition de 1568 - comme on peut le supposer au vu des éditions troyennes plus tardives mais conçues sur le même moule.

   Il semble donc qu’il y ait eu interférence entre plusieurs informations : Scève renvoie selon nous au deuxième volet des Centuries, celui qui est introduit par l’Epître à Henri II, et nullement au Recueil des Présages Prosaïques - dont le Livre Premier - sur les douze - s’intitule “extrait des commentaires d’iceluy (Michel de Nostredame) sur l’an M.D.L., LII, LIII, LIIII et LV” auquel, en revanche, se réfère le “Brief Discours”. Mais par ailleurs, le fait que les quatrains des almanachs figurent, dans les éditions troyennes, sous le titre “Présages tirez de ceux faicts par M. Nostradamus es années 1555 & suivantes iusques en 1567” a pu laisser croire qu’il ne s’agissait pas du même recueil que celui qui allait de 1550 à 1567 alors qu’il en est issu, ne conservant que les seuls quatrains d’almanachs, qui étaient inclus au sein d’un ensemble en prose qui en était le commentaire et dont les premiers attestés ne datent que de 1555, d’où le changement du terminus a quo.

La Première Face du Janus François (1594)

Frontispice
de la Première Face du Janus François (1594)

La Première Face du Janus François (1594, p. 6)
La Première Face du Janus François (1594, p. 7)

Extrait du passage “de 1550 à 1567”
(Première Face du Janus François, 1594, pp. 6 - 7)

   On n’en parle pas moins des “Présages de Nostradamus” pour désigner les quatrains des almanachs7 mais avec un certain flottement chronologique : “Dans les Présages de Nostradamus du mois d’Avril de l’année 1578 (sic) quoique dans les nouvelles impressions & même dans quelques-unes des vieilles, on l’ait mis sur Juin & d’autres sur Octobre 1579, mais il doit être du mois d’Avril 1578” et de reproduire le quatrain 115 d’octobre 1565 !

   En ce qui concerne la question des centuries incomplètes, la Clef de Nostradamus, de Jean Le Roux, est formelle (p. 188), commentant le passage de l'Epître à Henri II relatif à la “milliade de quatrains” :

   “Il est par là de toute évidence que l’Oracle avait entièrement achevé sa septième Centurie, parce qu’autrement, les trois autres Centuries suivantes ne pourraient pas parachever la milliade de quatrains, s’il en avoit manqué seulement un dans la VII Centurie (...) quoi que la parfaite plénitude n’ait point encore paru jusqu’aujourd’huy.”

   Le Roux semble avoir adopté, dans sa Clef de 1710 (p. 358), une chronologie bibliographique qui annonce celle actuellement la plus répandue : il situe l'Epître à Henri II “environ deux ans après la première édition qu’il fit faire de ses trois ou quatre premières Centuries”, soit 1555. Il semble donc qu’à cette époque on ait eu connaissance - ce à quoi l’Eclaircissement de 1656 ne fait pas référence - d’une édition à quatre centuries. Il est même fait mention, à un moment, d’une quatrième centurie à 53 quatrains.

   La Clef semble bel et bien (p. 274) se représenter la situation bibliographique comme on le fait de nos jours8 :

   “Si Nostradamus avoit mis au jour les trois Centuries (dédiées) à Henri II, du vivant de ce Prince, il s’en trouveroit des exemplaires, comme il s’en trouve des autres Editions d’auparavant (...) où l’on ne voit cependant jamais dans aucune Edition de ce temps là, jusqu’à 1568, d’autres Centuries que celles qui sont dédiées (à César).”

   On notera qu’il n’est pas fait mention d’une édition datée de 1566, chez P. Rigaud, celles-ci ne devant être produites qu’au cours du XVIIIe siècle.

   Dès alors, les éditions antidatées, datant de la période de la Ligue qui avait exclus les centuries VIII - X, font autorité et la parution posthume de celles-ci vient conforter, dans les esprits, le fait que les précédentes centuries, elles, seraient bien parues du vivant de MDN. D’où cette formule édifiante de Guynaud9 concernant ce qui détermina MDN “enfin de faire imprimer ses Prophéties le I. Mars 1555”, soit carrément à la date de la Préface à César.10

La Concordance des Prophéties (1693)

Frontispice
de la Concordance des Prophéties (1693)

La Concordance des Prophéties (1693, pp. 197 - 198)

Extrait du passage citant l'Epître à Henri II
de la Concordance des Prophéties (1693, pp. 197 - 198)

   Il est également intéressant de prendre la mesure de l’intérêt accordé à nos auteurs de la fin du règne de Louis XIV à l’année 1727. Guynaud n’hésite pas à interpoler cette date dans l’Epître à Henri II11 :

   MDN “nous dit : Que cette persécution sera plus cruelle & plus étrange que toutes celles qui ayent jamais été faites en Afrique & qu’elle durera depuis l’année 1727 jusques en 1792 que l’on cuidera alors être une rénovation de siècle” alors que le texte de l’Epître au roi - rappelons-le- est celui-ci :

   “& sera le commencement comprenant se (sic) de ce que durera & commençant en icelle année sera faicte plus grande persécution à l’Eglise Chrestienne, que n’a esté faicte en Affrique & durera ceste cy iusques à l’an mil sept cens nonante deux que l’on cuidera estre une rénovation de siècle etc” A priori, icelle année, c’est 1557 et non 1727 ! L’importance accordée à 1727 vient du quatrain 77 de la Centurie III12 :

Le tiers climat sous Aries comprins
L’an mil sept cens vingt & sept en Octobre
Le Roy de Perse par ceux d’Egypte prins
Conflict, mort perte: à la croix grand opprobre.

   On notera tout de même l'extrême liberté prise par rapport au texte, comme si l’on ne s’attendait pas à ce que le lecteur de 1693 ait en sa possession un exemplaire des Centuries et comme si le commentaire se substituait au texte, attitude au demeurant fréquente en milieu catholique, où la lecture directe des Ecritures n’était pas recommandée. M. Chomarat ne semble pas avoir localisé cette interpolation de Guynaud dans l’Epître à Henri II.13

   Un autre passage de l'Epître à Henri II interpelle les nostradamologues de la fin du XVIIe siècle :

   “Ce qui lui fait conclure (à MDN) que dans cent septante sept ans trois mois onze jours, le monde avant & après sera si fort diminué (…) Or, aujourd’hui, pour sçavoir si tous ces malheurs arriveront bientost dans le Monde, il faut remarquer que Nostradamus fit imprimer (sic) ses Prophéties en l’année 1555 (...) Vous trouverez que le tout fera justement cent soixante & dix-sept ans complets en l’année que nous compterons 1732 qui n’est pas un temps fort éloigné de nous.”14

   On observera donc que l’importance accordée aux années 1727 et 1732 tenait à la configuration de l’époque tout comme antérieurement on avait pointé les années 1585 et 1606. Notons cependant que le fait qu’un quatrain de la centurie III comporte l’année 1727 n’est pas indifférent : cela tient très vraisemblablement au fait que l’on ait ajouté 177 non pas à 1555 mais à 1550. Or, cette année ne figure pas dans l’Epître à César ni dans celle à Henri II, mais dans le “Brief Discours sur la vie de M. Michel de Nostradame” : “Nous avons de luy d’autres présages en prose faits puis l’an 1550 iusques à 67 etc.”15 D’ici à conclure que le quatrain 77 de la IIIe Centurie fut influencé par cette mention du BD, il n’y a qu’un pas que nous n’hésiterons pas, pour notre part, à franchir ; on peut en effet penser que la Centurie III fut rédigée après la mort de MDN et que l’on avait alors connaissance du Recueil des Présages Prosaïques, lequel démarre en 1550.16 Rappelons que 177, la moitié de 354, soit la durée d’un âge planétaire trithémien, figure ainsi dans la Préface à César : “le monde s’approche d’une anaragonique révolution & que de présent que ceci j’escriptz avant cent & septante sept ans troys moys unze jours par pestilence etc.” Or la centurie III accompagne la dite Préface.

   L’enseignement principal que nous retirerons de cette (trop) brève recension de quelques ouvrages marquants de l'exégèse nostradamique depuis le Janus Gallicus (1594) jusqu’à la Clef de Nostradamus (1710) concerne les premières centuries et la Préface à César qui les précède : il semble bien que l’on ait mis en évidence le caractère posthume de cet ensemble. Il est inconcevable que MDN ait pu mentionner dans sa Préface à son jeune fils, un ensemble de textes qui n’étaient pas encore écrits, à savoir le contenu du RPP ; il s’agit donc bien d’une contrefaçon. Et ce sentiment est renforcé par la présence de la mention de l’an 1727 à la Centurie III et qui ne fait sens que par rapport au dit recueil démarrant en 1550. Selon nous, les faussaires se sont trahi / coupé, ils ont accordé, par mégarde, à MDN un savoir rétrospectif qui ne pouvait être le sien, tout prophète qu’il était, et dont ils disposaient dans leur atelier. Il est clair, en effet, que le diptyque : douze livres de centuries, sous forme versifiée et douze livres de présages (RPP), sous forme prosodique, tel qu’annoncé / programmé dans le BD, ne prit cette forme qu’à la mort de MDN, l’un constitué de documents authentiques, l’autre de textes contrefaits.

   Les 12 livres du RPP se répartissent ainsi : Livre I (tout ce qui va jusqu’à 1555 inclus) puis onze autres livres, de II à XII ( de 1557 à 1567). Il faut comprendre que l’autre volet est considéré comme posthume, il est supposé ne se dévoiler que progressivement, ce qui explique que l’on ait pu ajouter un certain nombre de Centuries, dans les années 1580, formant une miliade. Mais il restait encore de la marge, soit deux livres de centuries de quatrains, et c’est alors que l’on fut tenté d’intégrer les quatrains des almanachs, autour de 150, pour terminer par les sixains, quitte à réduire le nombre de Présages à 141.17

   Ce qui vint introduire de la confusion tint au fait que :

   1° les quatrains du RPP furent extraits de leur glose en prose, après le stade de la miliade, pour se joindre, syncrétiquement, au livre de centuries mais qu’en revanche,

   2° le Livre de Centuries lui-même fut divisé en deux volets, avec deux épîtres.

   Il n’en fallait pas plus pour générer quelque quiproquo.

Jacques Halbronn
Paris, le 5 août 2003

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2

La Préface à César,
Nostradamus et la comète de 1556

    Michel de Nostredame était astrologue tandis que la plupart des quatrains qu’on lui attribue ne paraissent nullement avoir une origine astrologique. Mais qu’en est-il des quatrains de ses almanachs ? Est-ce que le style des dits quatrains est si différent de celui de ceux des Centuries ? Nous avons déjà montré que la composition des Présages était à rapprocher des formules propres aux Prophéties Perpétuelles.18 Mais on peut alors se demander quelle est la source des pronostics dites Prophéties Perpétuelles. Il nous semble qu’il faille chercher du côté des comètes.

   En effet, en étudiant la littérature des XVIe - XVIIe siècles relative aux comètes et à leur (prétendue) influence, nous avons été frappé par le recours aux mêmes expressions que dans les Prophéties Perpétuelles et dans les quatrains des almanachs dus à Michel de Nostredame. Cela pour montrer que l’inspiration des quatrains, en dépit d’un certain mimétisme, n’est pas conforme au style des Présages et comme l’ont noté certains observateurs n’a plus rien d’astrologique, sinon très ponctuellement.

   Un texte retiendra tout particulièrement notre attention, il s’agit d’un traité de Gabriele Symeoni, paru en 1556, intitulé De la génération, nature, lieu, figures, cours & significations des comètes, Lyon, Jehan Brotot19 et qui comporte des développements significatifs sur Henri II. L’ouvrage paraît chez un libraire lyonnais avec lequel MDN sera en affaires pour ses almanachs et prognostications. L’épître à Guillaume Guadagne, Sénéchal de Lyon, date du Ier avril 1556, ce qui la place à quelques jours près à la même date que l’Epître que MDN dédia à Antoine de Bourbon, le 21 mars 1556, en tête de sa Grand Prognostication nouvelle et portenteuse prédiction pour l’an 1557, Paris, J. Kerver.20 Signalons, en passant, que le changement d’année s’effectuait alors à la fin février, ce qui explique pourquoi c’est ce mois qui est affecté par les années bissextiles. Les deux autres épîtres (Almanach et Présages Merveilleux datés de janvier 1556 seraient en fait de 1557). Sur cette question du calendrier, nous relèverons les points suivants à propos d’un Traité des Comètes et signification d’icelles, etc, Paris, Ph. Le Noir, 154021 où l’on passe du “dernier jour de février 1539” au “5e jour de mars 1540”.

   Il est intéressant de lire le texte consacré à Henri II qui serait donc postérieur à celui de Symeoni et qui, éventuellement, pourrait en avoir été influencé. Et ce d’autant que vient s’ajouter in fine, en italien, langue de Symeoni, une Elegia del medesimo al Christianissimo & invitissimo Henrico II Re di Francia, supra la significatione della medesima Cometa, soit une Elégie du même Symeoni au très chrétien et invinctissime Henri II Roi de France, sur la signification de la même Comète. Il s’agit d’une comète observée à Lyon entre le 9 et le 16 mars 1556, au moment même où MDN s’adresse au Roi de Navarre.

   Ci-dessous donc, le passage consacré (p. 43) par Syméoni au thème natal du Roi :

   “Lequel malheur, je craindrais ne devoir jamais cesser ou prendre fin, ne fust que cognoissant par son heureuse nativité (comme un chacun peut voir) la naturelle & grande bonté, équité, magnanimité, religion & iustice du très puissant & redoubté Henry Second Très Chrestien Roy de France, j’espère que bientost regardant le bon prince en pitié le misérable monde, oyant la vérité, parler, voyant clairement & entièrement sa puissance, cognoissant la finesse de ses ennemis parmy tant de désordres & employant tout d’un coup ses forces, il prendra des humains par force la Monarchie, qui luy est due & de long temps promise par les astres & mesme cestuy an (dès l’année en cours) par son MART (italianisme pour Mars) direct, Mercure fortuné, & la notable conjonction quasi de tous les planètes en son triumphant & Royal Horoscope.”

   Mais outre la possible influence des adresses de l’astrologue franco-italien au Roi de France22, nous intéresse au premier chef le recours à une certaine terminologie prédictive.

   Nous avons relevé au fil des pages de l’ouvrage de Symeoni consacré aux comètes les formules suivantes lesquelles, il nous semble, font écho à ce que l’on trouve dans les quatrains des almanachs que MDN commença à publier à une date qui reste à préciser (en raison des problèmes liés au cadre dans lequel les quatrains pour 1555 seraient parus : selon Ruzo, dans la Prognostication pour 1555 !) mais qui, si l’on devait se fier au RPP serait 1554 pour 1555, encore que la série continue ne débute qu’en 1556 pour 1557. Non point certes, que les dits quatrains se réduisent, dans leur totalité, à de telles formules mais celles-ci, assurément, constituent une des principales sources dans lesquelles MDN aurait puisé.

   Quelques formules figurant dans le De la génération, nature, lieu, figures, cours & significations des comètes :

Guerres limitrophes & civiles
Vents impétueux
Mort de grands seigneurs
Grands vents
Tempestes de mer
Desbordemens des rivières
Changements d’Empires, de Royaulmes & de Républiques
Abondance de froment
Effusion de sang
Pertes
Meurtres
Occisions
Longues calamitez
Troubles
Dissensions
Hérésies
Mutinations populaires
Voyages de Princes
Changement & révoltements des villes, des Républiques, assemblées
Mort subite
Tréves violées & rompues
Avarice
Ingratitude
Ambition des hommes
Sécheresse
Famine
Peste
Fiévres pestilentielles
Mort de princes

   On relèvera une telle ambivalence de l’agricole et du politique qui caractérisent tant le discours sur l’influence des Comètes que celui, qui pourrait en être issu, qui est récurrent dans les Prophéties Perpétuelles.23

Préface à César (Lyon, Macé Bonhomme, 1555)

Extrait de la Préface à César
(Lyon, Macé Bonhomme, 1555, fol. B4r)

   Par ailleurs, on retrouve une terminologie du même ordre dans la Préface à César qui nous conduit à penser que MDN écrivait à propos d’une comète quand il parle de “messagers de feu en flamme missive” ou du “mortel glaive” qui fait songer à la forme de certaines comètes :

   “Et que de présent que cecy j’escrits avant cent septente sept ans (etc) par pestilence, longue famine & guerres & plus par les inondations le monde entre etc.”

   L’épithète “long”, associé à quelque malheur, est plusieurs fois attesté chez Syméoni.

   “aussi aucunes fois Dieu le Créateur par les ministres de ses messagers de feu, en flamme missive, vient à proposer aux sens extérieurs, mesmement à nos yeux, les causes de future prédiction etc.”

   Ces “messagers de feu, en flamme missive” sont évidemment les comètes !

   “que le mortel glaive s’approche de nous maintenant, par peste, guerre plus horrible qu’à vie de trois hommes n’a esté & famine, lequel tombera en terre.”

   On relèvera, en outre, dans cette Préface à César, le triptyque des calamités : peste, guerre, famine. Même le premier quatrain de la Centurie I, faisant suite à la Préface à César, dans le corpus centurique, pourrait être inspiré par les comètes :

Flambe exiguë sortant de solitude

   Dans un texte d’Antoine Crespin, consacré à la fameuse comète de 1577, intitulé Au Roy Epistre et aux autheurs de disputations sophistiques de ce siècle, sur la déclaration du présage & effaictz de la Comette etc, Paris, Gilles de S. Gilles, 1577, on pouvait lire le passage suivant :

   “Nou ayant veu par plusieurs & divers foys la Comette que dessus nous faisons mention laquelle c’est (sic) changée en plusieurs sortes & mesmement un soir sur la minuit,

Que moy estant ravy en mon secret estude
Et reposant tout seul sur la selle d’airain
Va exigu flambeau sortant de solitude
Me faict dire cecy que croyrez en vain.”

   Ce qui n’est évidemment pas sans évoquer le dit premier quatrain de la première Centurie, non sans des variantes nous conduisant à nous demander quelle mouture est la plus signifiante.

   Cette Comète de 155624 est connue sous le nom de “comète de Charles Quint” en ce qu’elle coïncida avec son abdication. Le titre d’un ouvrage de Claude Groslier fait écho avec le “glaive” de la Préface à César, il s’agit de la Signification véridique de la Comète à nouz en notre Hémisphère apparue, de la conjonction de Saturne & Mars, du bras armé tenant de la main une espée sanglante de la pointe de laquelle sortira abondance de feu des deux éclipses, à savoir de Soleil & Lune & autres signes qui doivent apparaître cette année 1556, Monferrant, B. Belis & J. De Rémortier.25

   Certes, cette Préface est-elle contrefaite mais elle n’en conserve pas moins des traces de la mouture originale et nous n’excluons pas qu’elle puisse être associée à la comète de 1556, dont parle Siméon. Autrement dit, cette Préface à César aurait été associée avec la dite comète, donc daterait 1556. Ne pourrait-on envisager que la Préface daterait non pas du Ier mars 1555 mais de mars 1556, mois durant lequel Syméoni aurait précisément observé la dite Comète ? Rappelons que le passage de 1555 à 1556 a justement lieu, à l’époque, à ce moment là et que les Prophéties de Couillard sont également datée de 1556. Il est vrai que certains textes des dites Prophéties sont datés (pp. 26 recto, et 29 verso, de janvier 1555, ce qui signifie en fait 1556. Mais, en tout état de cause, il ne s’agit là que d’un terminus a quo et non pas ad quem, le terminus ad quem étant bien l’année 1556 (privilège du 4 mai 1556), qui figure sur la page de titre.

   On ne saurait cependant ignorer une autre pièce à conviction, il s’agit de la traduction allemande par J. Heller, d’une Epître sur une comète observée sur Salon26 dont l’original français semble avoir disparu, adressée à Claude, Comte de Tende, en date du 19 mars 1554 et qui pourrait être le plus ancien texte de MDN dont on connaîtrait le contenu, il serait contemporain de la Prognostication pour 1555, dont D. Ruzo a fourni la page de titre.27 Cette épître qui tient en une seule page et comporte une comète chevelue, s’intitule : Ein erschrecklich und Wunderbarlich zeychen etc.28 On y trouve des accents qui se retrouvent dans la Préface à César du Ier mars 1555, soit un an plus tard : “Krieg, Feuer, Hunger, Pestilenz etc” (guerre, feu, famine, peste). Est-ce à dire que MDN se référait à la dite comète de 1554, dans son Epître à son fils ou bien les faussaires ont-ils amalgamé ce texte avec ceux concernant la comète au glaive de 1556 ? Précisons que la comète de 1554 comportait, pour sa part, un visage (Gesicht), ce dont il n’est pas question dans l’Epître à César telle que nous la connaissons.

   On sait, en tout cas, qu’à la différence d’une éclipse, on ne rencontre pas de spéculation antérieure à la date où la comète est visible, en un point donné. Donc il est exclus que MDN ait abordé le sujet de la comète avant 1556.

   En tout cas le quatrain qui ouvre les Présages est typiquement cométique dans son langage, recoupant de façon frappante, celui de Syméoni :

“Trouble, famine, peste, guerre courir
Eaux, siccitez (sécheresses) , terre & mer de sang teint
Paix, tresve (trêve) à naistre Prélats, Princes mourir”

   Cette référence assez flagrante à la Comète - qui a échappé à P. Brind’amour, lequel propose, pour le glaive, un rapprochement avec un ouvrage de 1492, du à Savonarole29 - a fort bien pu être suivie de Prophéties Perpétuelles comme pourrait en témoigner un passage de l’Epître à Antoine de Navarre en tête de la Grande Prognostication pour 1557 :

   “A l’exemple desquels me suis appliqué à spéculer les significations des choses occultes & les déclairer d’an en an, selon que mon petit esprit peut comprendre”, qui pourrait être interprété comme renvoyant à un tel type d’ouvrage fournissant des pronostics année par année, sous un seul et même volume. On pourrait y voir certes une allusion à la production annuelle de MDN, mais cela nous semble ici quelque peu redondant ; nous pencherions plutôt en faveur de “Vaticinations Perpétuelles”, selon la formule qui subsiste dans la Préface à César. C’est à rapprocher de la formule de Couillard (Prophéties, 1556) : “prognostications, almanachs & prophéties après un an” (p. 26 recto). Bien plus, il convient de se reporter à un texte paru en 1568, à Rouen, Pierre Brenouzer, d’ailleurs signalé par R. Benazra30, les Prédictions pour 20 ans, continuant d’an en an iusques en l’an 1583 (...) Extraictes de divers auteurs trouvés en la Bibliothèque de nostre defunct dernier décédé (...) Maistre Michel de Nostredame. A la supplication de plusieurs ont estez à très grande diligence revues & mises en lumière par Mi. De Nostradamus le Ieune.31 Que sont ces prédictions “d’an en an” dont, selon nous, la Préface à César était l’annonciatrice ? Chaque année est associée à une planète, comme dans le système trithémien, pour les phases de 354 ans. La succession fictive des astres correspond grosso modo à l’ordre des jours de la semaine : Soleil, Lune, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne et ainsi de suite. Ci-dessous, un échantillon de cette prose en précisant que ce n’est pas parce que deux années sont gouvernées par la même planète que le texte proposé est identique si bien que l’on peut ainsi vendre des ouvrages qui feront carrière non pas durant un an mais sur de nombreuses années :

   “Prédiction de l’an Mil cinq cens quatre vingt. VENUS : De cest an de bissexte sera dame la belle Vénus (...) L’hyver sera fascheux & froid, le printemps sera par foys venteux. L’Esté sera un peu humide mais bon, l’Automne sera sec, sans pluye. Il y aura abondance de bled & sera à bon marché. Les vins seront bons & beaucoup. Le mal des yeux régnera & beaucoup de petits enfants mourront. Peut aussi estre que les Princes seront en grande dissension en divers points du monde. Grande mortalité sera des Seigneurs & gens d’estime (...) Quant à l’huyle & miel il en sera beaucoup. Mais grande mortalité sera entre les brebis etc.”

   C’est de ce type de texte que, selon nous, se gaussait un Antoine Couillard, dans ses Prophéties de 1556.

   On fera à propos de cet ouvrage daté de 1568 plusieurs remarques :

      - son ton est posthume à la différence des éditions datées de cette même année 1568. C’est l’unique exemple conservé d’une telle présentation.

      - la vignette qui y figure est celle qui sera reprise par le modèle Du Ruau et notamment l’édition datée de 1565.

      - il y est question d’un Mi. De Nostradamus le Jeune, sous une forme qui sent dès cette époque l’imposture.

      - l’ouvrage fait partie d’un recueil factice conservé à la BNF et qui comporte aussi le texte déjà cité de Claude Grolier sur la comète de 1556 et dont l’intitulé est si proche d’un passage situé à la fin de l’Epître à César. Autant dire un recueil mal exploité par les nostradamologues et qui éclaire sensiblement, on l’avouera, le cas de la dite Préface.

Présages pour treize ans (1573)       Li Presagi et pronostici (S. d.)

“Prophéties d'an en an”
Texte français : “présages pour treize ans continuant d'an en an”
Texte italien : “Li Presagi et Pronostici (...) discorrendo di Anno in Anno”

   En conclusion, nous pensons avoir montré que la Préface à César, telle que nous la connaissons ne peut être datée de 1555, puisqu’elle fait référence à la comète de mars 1556 comme terminus a quo. On peut donc supposer que les faussaires, s’embrouillant peut-être dans le calendrier - on aurait ainsi un cas assez semblable à celui des Significations de l’Eclipse de 1559, avec l’emprunt à Leovitius32 - empruntèrent au traité cométologique de Syméoni des éléments pour étoffer le propos, paru chez le libraire lyonnais Jehan Brotot. Mais nous pensons que ce traité a bel et bien inspiré MDN dans son adresse de janvier 1556 (c’est-à-dire 1557) à Henri II en tête des Présages Merveilleux pour 1557. Syméoni avait par ailleurs déjà été en 1555 l'auteur d'un texte dédié à Henri II, Le Présage du triomphe des gaulois, déclaré et envoyé par le seigneur Gabriel Syméon à tres chrestien et invincible Prince Henry II de ce nom roy de France. Il presagio del triomfo dei Francesi, Lyon, Gabriel Cotier.

   On avait déjà signalé une contrefaçon d’un autre texte de Syméon, Les prodiges merveilleux advenus et veuz en Allemagne, 1556.33 La réponse de Siméoni à Solani sera reprise en 1623 et réattribuée, dans le Récit véritable d’une lettre envoyée par Maistre A. Maginus (...) à Maistre Jean Belot (...) touchant les signes et prodiges espouventables advenus en la ville de Vilmart (Weimar) en Allemagne, etc.34 Nous en reproduisons un passage typique au sujet de la comète de 1556 :

   “Arcs, doubles Lunes & Comètes, comme celle que le moys dernierement passé est apparu avec tout plain (sic) d’autres signes & une main que l’on m’a dit avoir esté encore veue, avec deux doigts dressés en haut en Allemagne apparemment en l’air ou se montrent en terre, signifiant guerres, pestes, famines, trahisons, assaulx des ennemis, estranges meurtres, séditions & mutinations populaires par la volonté de Dieu lequel toutes foys nous ayme (...) que premier que de nous perdre nous veut admonester par ces moyens qu’il est prest à nous punier en cas que nous voulons changer de voix & dire.” (22 avril 1556, Syméoni à Solani)

   Il nous semble désormais acquis que dans son Epître au père d’Henri IV de mars 1556 (Grande Prognostication pour 1557), MDN faisait bel et bien référence à ses Prophéties (perpétuelles) dédiées à César et parues depuis peu, pourquoi pas chez Macé Bonhomme, autre libraire lyonnais d’ailleurs et sous le nom de Prophéties comme l’indique le privilège, peut-être authentique, de la contrefaçon datée de 1555. Le témoignage de Couillard (janvier 1556)35, nous inciterait à penser que la Préface à César d’origine est bien parue en 1555 et non en 1556 et que les passages relatifs aux comètes sont l’oeuvre maladroite de faussaires, recourant aux documents d’époque qui semblaient pouvoir renforcer le propos prophétique de MDN face aux événements qui allaient suivre et dont il n’avait peut-être pas vraiment su apprécier l’importance. Une telle entreprise visait, rappelons-le, à peaufiner l’image d’un MDN, astrologue inspiré.

   Cependant, il convient de prendre en considération les observations de Bruno Petey-Girard36 concernant le quatrain IV, 67 :

L’an que Saturne et Mars esgaulx combust
L’air fort seiché longue trajection
Par feux secretz, d’ardeur grand lieu adust
Peu pluye, vent chault, guerres, incursions

“Conjonction de Saturne et de Mars dans le Bélier au voisinage du Soleil à la mi-mars 1556. Le terme “trajection” est fréquemment appliqué à une étoile filante. Allusion à la comète du printemps 1556 ; l’été 1556 fut marqué par une très grande sécheresse.”

   Le fait qu’il s’agisse là d’un quatrain situé après le quatrain 53, qui clôture certaines éditions à quatre centuries (Macé Bonhomme, Lyon 1555, Raphael du Petit Val, Rouen, 1588) viendrait confirmer l’unité thématique de la Centurie IV. Rappelons que l’apparition de cette comète ne pouvait être déterminée à l’avance, à l’époque, ce qui signifierait que ce quatrain est nécessairement postérieur au passage de la dite comète, survenu lors d’une conjonction Mars-Saturne.37 En fait, on assisterait là à un décalage du même ordre que celui signalé par nous et par Théo Van Berkel à propos des Significations de l’Eclipse de 155938, à savoir que l’Epître à César dont traite Couillard ne pouvait se référer à la comète de 1556 et que par conséquent ce qui touche à cette comète, tant dans la dite Epître que dans les quatrains qui l’accompagnent ne figuraient pas dans l’ouvrage ainsi introduit, commenté par Couillard au début de 1556. Il y aurait là une bévue des faussaires qui ne perçurent pas cette impossibilité / incompatibilité entre les quatrains cométiques, la Préface du Ier mars 1555 - et le témoignage de Couillard confirme qu’il faut lire 1555 et non 1556, cette question du changement d’année étant en fait assez floue surtout pour la période approchant Pâques - et les éventuels emprunts à la littérature susmentionnée relative à la dite comète de 1556.

   On notera que le langage cométique et celui des Prophéties Perpétuelles se recoupe fortement, tout comme d’ailleurs celui des quatrains des almanachs. D’ailleurs l’almanach pour 1567, le dernier attribué à MDN - et dont il semble qu’il parle dans son testament - ne comporte plus que des formules de ce type pour composer les quatrains alors que les premiers almanachs comprenaient d’autres données d’un autre type. On peut dès lors se demander (cf. TPF) si ce dernier almanach est bien de MDN ou bien s’il a été fabriqué avec les moyens du bord de façon à ne pas perdre le bénéfice de la vente.

   A titre complémentaire, nous fournirons une autre liste de formules figurant dans un traité datant de 1608, le Discours des Comètes de Jean Taxil, Lyon, Claude Morillon39, paru à l’occasion du passage de la Comète de 1607 :

   “Les uns estiment qu’icelles comètes causent la peste, & corrompent l’air : les autres la guerre, les autres la famine & stérilité : les autres croyent qu’elles produisent des inondations extraordinaires : plusieurs tiennent qu’elles excitent des tremblements de terre, les mutations des loix & religions par l’événement de quelques faux Prophètes. Quelques autres pensent qu’elles traînent quant & soy des vents esmerveillables, le bouleversement des villes, la ruine des Etats, des Royaumes & des Républiques ; la mort des Roys & changement des Sceptres & plusieurs autres maux. Au contraire, quelques autres disent qu’elles signifient la naissance et prospérité des Rois.” (p. 76)

   En ce qui concerne l’Histoire des comètes, le même Taxil rappelle que “Guillaume Drieu, mathématicien de la ville d’Aix en Provence (…) dict qu’en l’année 1559 en fut vue une autre en forme de lance qui se fondit en fin contre terre & peu de jours après le Roy Henry second fut tué au Tournoy d’un coup de lance.” (p. 84)

L’influence de Savonarole sur la Préface aux Prophéties

   Henri Torné-Chavigny avait souligné, au siècle dernier, certaines similitudes existant entre le texte de la Préface aux Prophéties et le Compendium de Jérome de Ferrare dit Savonarole (1452 - 1498). Notons avec P. Brind’amour40 mais surtout, de façon très détaillée dans son édition des Premières Centuries ou Prophéties (Genéve, Droz, 1996, pp. 7 et seq), que ce texte figure en bonne place dans le Mirabilis Liber - Nostradamus a pu le connaître en effet par ce biais - tout comme la Prognosticatio de Jean de Lichtenberget la Prophétie de Johannes Vatiguero.

   Mais il importe d’apprécier le traitement que Michel de Nostredame a fait subir à la pensée du moine de la Florence de la fin du XVe siècle. Indiscutablement, l’on retrouve chez Nostradamus l’image du glaive, des veilles nocturnes ainsi que certaines coquetteries : “par l’esprit de prophétie : non que je me veuille attribuer nomination ni effet prophétique” ou bien “encore que j’ai inséré le nom de prophète, je ne me veux attribuer titre de si haute sublimité” qui se retrouvent chez Savonarole41 : “Loin de moi l’ambitieuse pensée de vouloir passer pour un prophète car cette dénomination est grave”, ou encore : “combien que de longtemps par plusieurs fois j’ai prédit longtemps auparavant ce que depuis est advenu” se retrouve chez Savonarole : “Quoique en plusieurs occasions... j’aie prédit des événements futurs”.

   On retrouve les mêmes réserves :

   “Je passe sous silence les prédictions qu’il ne m’a pas été permis de divulguer pour éviter le scandale”.

   Il convient de distinguer dans ce texte la philosophie, la pronostication et la technique.

   L’on peut soupçonner Nostradamus d’avoir pris Jérôme Savonarole pour archétype du prophète moderne. Il menace des mêmes maux : guerre, peste, famine, Déluge.

   La pensée de Nostradamus dans la Préface aux Prophéties est ainsi formulée : “Mais Dieu qui ne peut mentir a accompli à la lettre jusqu’à ce jour tout ce qu’il avait bien voulu ordonner” et correspond chez Savonarole à : “La miséricorde du Seigneur ne sera point dispersée un temps que la plupart de mes prophéties seront accomplies”.

   Toutefois, Nostradamus a réalisé son “abrégé” du Compendium à sa façon, non sans quelques libertés. Au sujet de l’astrologie, tout oppose les deux hommes. Nostradamus mentionne celle-ci dix fois dans sa courte Préface sans jamais la condamner. Savonarole la met dans la bouche du Tentateur et la rejette. Il est d’ailleurs l’auteur d’un traité en italien (conservé à la Mazarine), inspiré par les attaques de Pic de la Mirandole. Si bien que le Mirabilis Liber, paru dans les années 1520 mais comportant des documents datant de la fin du XVe siècle, tel que le Compendium, comporte à la fois l’apologie de Lichtenberger et les attaques de Savonarole sur la question de l’Astrologie.

   Qu’on en juge :

   La phrase de Savonarole : “C’est pour cela que tous les arts divinatoires à la tête desquels marche l’astronomie judiciaire sont condamnés par la Sainte- Ecriture et par les canons de l’Eglise” devient chez Nostradamus : “mesmes la vanité de la plus que exécrable magie réprouvée jadis par les sacrées Ecritures & par les divins canons au chef duquel est excepté le jugement de l’astrologie judicielle”.

   Nostradamus dit - ou bien on lui fait dire - le contraire de ce qu’avance Savonarole : pour l’Italien, l’astrologie est au coeur de la réprobation “à la tête desquels marche l’astronomie”, pour Nostradamus, elle y échappe : “au chef duquel est excepté”. On pourrait croire à une erreur de traduction si l’on ignorait les opinions de Nostradamus.

   On aurait donc détourné la pensée anti-astrologique du Florentin pour la mettre dans la bouche d’un astrologue. Encore faudrait-il la part de ce qui relève de la Préface d’origine à César et de ce qui relève de ceux qui ont retouché la dite Préface, sous la forme qui sera la sienne dans les années 1580.42

Jacques Halbronn
Paris, le 1er septembre 2003

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3

Du mode de fabrication des Centuries ignées

    Comment les faussaires s’y prirent-ils pour faire du Nostradamus ? La méthode qui semble avoir été appliquée - et qui pourrait relever d’une forme de clonage - nous semble avoir consisté en deux principes :

      - des variations sur une thématique centrale, celle des comètes, du feu, de la lumière qui confère une unité certaine à l’ensemble des premières Centuries (I - IV). On pourrait ainsi parler de Centuries ignées ou de feu.

      - la sélection d’un certain nombre de mots clef de la Préface à César à partir desquels, parfois dans un contexte complètement différent, des versets ont été élaborés. Le cas par exemple de l’usage répété dans la Centurie IV au mot fils nous semble assez remarquable (cf. infra).

   Nous avons déjà signalé43 le cas de l’année 1727 qui serait associé à la mention de 177 ans - il est possible d’ailleurs, que le fait que ce quatrain soit précisément le 77e de la Centurie III ne soit pas une coïncidence.44

   Nous avons recherché des allusions à la comète dans ce même groupe de Centuries qui accompagne la dite Préface et nous avons en effet trouvé un certain nombre de recoupements qui nous confirment dans notre conviction qu’un quatrain (I, 1, troisième verset) comme celui qui traite de “flambe exiguë” reprend une formule qui figurait, à deux reprises, dans le texte en prose de la Préface et qui est attesté par Couillard45 et qui pourrait d’ailleurs appartenir à cette même thématique cométique. On lit dans la Préface :

   “Et telle lumière & flamme exiguë est de toute efficace & de telle altitude non moins que la naturelle clarté & naturelle lumière etc.”

   Mais aussi et surtout :

   “moyennant la exiguë flame en laquelle partie les causes futures se viendront incliner”

   Outre le premier quatrain, un autre quatrain reprend ce mot :

IV, 24
Humaine flamme pour divine voir luire

   Mais aussi :

IV, 82
Puis la grand flamme estaindre ne sçaura

   Jean-Charles de Fontbrune46 a recensé les versets des quatrains relatifs aux comètes, sans pour autant faire référence à ce propos à la Préface à César qui en est, selon nous, la clef.

   Le nom même de comète vient d’un mot grec, komé, pour chevelure ; on ne sera donc pas surpris de trouver “estoille chevelue” en (II, 43). De même l’image du glaive, propre à la comète de 1556 revient-elle en (II, 96) et surtout en (II, 56). On a d’ailleurs en (II, 62), ni plus ni moins que le mot comète :

De gens & bestes une horrible defaite /…./ Cent, main, soif, faim, quand courra la comete

II, 41
La grand’estoille par sept jours bruslera

II, 43
Durant l’estoille chevelue apparente
Les trois grands princes seront faits ennemis
Frappés du ciel paix terre tremuleuse


II, 56
Que peste & glaive n’a seu dessiner
Mort dans le puys sommet du ciel frappé

   Voir aussi :

I, 11
glaifves, feux, eaux etc.

I, 56
Que peste & glaive n’a seu desiner

I, 91
avant ciel veu serain, espée & lance

II, 91
Par glaive, feu, faim etc.

III, 75
De glaives loings terroirs de sang humides / Peste si grande etc.

II, 70
Le dard du ciel fera son estendue

II, 81
Par feu du ciel la cité presque aduste

II, 92
Feu couleur d’or du ciel en terre veu etc.

II, 96
Flambeau ardent au ciel soir sera veu
Près de la fin & principe du Rosne
Famine, glaive ; tard le secours pourveu
La Perse tourne envahir Macédoine

   Le quatrain (II, 43) est peut-être le plus significatif avec la mention de “trois grands princes”, ce qui pourrait être rapproché du nombre trois figurant dans certaines descriptions de la Comète de 1527 (cf. infra).

   On songe, en effet, au passage suivant de la Préface à César :

   “Que le mortel glaive s’approche de nous maintenant, par peste, guerre plus horrible qu’à vie de trois hommes n’a esté & famine, lequel tombera en terre”

   Le nombre trois se retrouve aussi en (I, 68) :

O quel horrible & malheureux tourment
Trois innocens qu’on viendra à livrer
Poyson suspecte, mal gardé tradiment
Mis en horreur par bourreaux enyvrés (enivrés)

   Mais aussi :

I, 31
Victoire incerte trois grands couronneront

   Ou encore :

I, 39
Par troys l’empire subrogé exancle

   Ou :

I, 65
Trois souz les chaînes par le milieu troussés

   On trouve également un écho cométique à la Centurie I :

Quatrain 46
Grand feu du ciel en trois nuictz tumbera

Quatrain 62
Feu grand déluge plus par ignares sceptre

Quatrain 64
De nuict soleil penseront avoir veu

Quatrain 80
De la sixiesme claire splendeur céleste

   Et dans la centurie III :

Quatrain 7
Les fugitifs, feu du ciel sus les piques

   Et surtout le 100ème quatrain de la IVe centurie :

Du feu céleste au Royal edifice

   Les centuries I - IV seraient, du moins en partie, une sorte de décalque47 de la Préface à César, ce qui montre que le passage de la prose au vers ne fait guère problème, les quatrains des almanachs étant eux-mêmes constitués de formules oraculaires mises bout à bout.48 Nous procéderons ici à un bref sondage, il conviendrait d’inventorier plus systématiquement pour prendre la véritable mesure d’un tel procédé. Avis aux amateurs !

   Parfois, il pourrait ne s’agir que de mots spécifiques repris, dans un autre contexte, comme Mahomet, qui au fond ne sont pas si fréquents. On connaît le jeu qui consiste à former des phrases utilisant certains mots. Il nous semble que c’est la méthode qui a été suivie : on a extrait quelques dizaines voire centaines de mots de la Préface et on a brodé autour pour en faire des quatrains.

   On a ainsi un sentiment de déjà vu :

I, 18
Sera passaige à Mahommet ouvert

III, 23
Mahomet contraire, plus mer Hadriatique

   A rapprocher de :

par songes Mahométiques (Préface à César)

   Ou encore :

De Vlcan (sic) Hermes sera faicte pasture

   Qui fait pendant à :

ay faict apres la lecture présent à Vulcan dans la Préface

   Quant au quatrain (II, 11) :

Le prochain filz de l’aisnier parviendra

   Ou encore :

IV, 58
Chef seille d’eau, mener son fils filer

   Ou :

IV, 60
Deux par son filz seront d’estoc percés

   Ou :

IV, 61
Mains de son filz mangées devant sa face

   Ou :

IV, 83
Son propre filz le tiendra assiégé

   Ou :

IV, 87
Un filz du Roy tant de langues aprins /…/ Son père beau au plus grand filz comprins

   Ou :

IV, 91
Son fils regner avant mort taschera

   Cela pourrait correspondre à la mention répétée de “fils” dans la Préface, comme dans “Viens à ceste heure entendre, mon fils, que je trouve etc.”

   Une autre présence récurrente est celle de la Lune, autre phénomène cosmique populaire, moins abstrait que celui des planètes. Là encore, la Lune, évoquée dans la Préface à César va se retrouver, sous des prétextes divers, dans les quatrains des premières Centuries.

   “Et maintenant que sommes conduicts par la Lune” (Préface) donnera selon le procédé décrit :

I, 25
Ains que la Lune achève son grand siècle

I, 48
Vingt ans du règne de la Lune passés

I, 56
Que si la Lune conduicte par son ang

   On ne compte pas les quatrains comportant des occurrences de “peste”, “guerre”, “famine” comme en (III, 19) :

Grand peste & guerre, faim & soif fera voir

   On notera donc que l’inspiration de la Préface à César et singulièrement des quatre premières centuries est fortement marquée par le phénomène Comète, tant en ce qui concerne le signifiant, c’est-à-dire la description de l’astre, que du signifié, à savoir les effets qu’il est censé annoncer. MDN, le vrai ou le faux, peu importe ici, nous apparaît ici, plus comme un cométologue, décrivant les manifestations célestes imprévisibles que comme un astrologue annonçant des configurations prévues de longue date. C'est peut-être cette dimension cométique moins hermétique que celle de l’astrologie planétaire, plus savante, qui aura frappé les esprits à la lecture des quatrains des premières Centuries. Curieusement, le mot même de comète ne figure pas dans la Préface à César et cela suffit probablement à expliquer que l’on ne se soit pas orienté jusque là dans ce sens.

   Reconnaissons cependant que le rapprochement entre comète et glaive est classique. L’iconographie cométique fait amplement référence au glaive et cela déjà, près de trente ans plus tôt, en 1527, dans La terrible et espoventable comete laquelle apparut le XI Doctobre lan MCCCCCXXVII en Westrie region Dalemaigne. Item le merveilleux brandon de feu qui quasi traversa toute la France et terrible bruit quil fist en passant dessus Lyon le V davril MCCCCCXXVIII etc.49 L’iconographie sera reprise, avec quelques variantes notamment, par Ambroise Paré, dans les années 1570, dans ses Monstres et Prodiges.50 Le commentaire figurant, au cours des années 1560, dans les Histoires Prodigieuses de Boaistuau et de Tesserant, évoque la Préface à César : “A sommité de la Comète on voyait le caractère et figure d’un bras courbé, tenant une grande espée en sa main, comme s’il avait voulu frapper. Au bout de la poincte de ce cousteau, il y avait trois estoilles (...) se voyait grand nombre de haches etc.” On peut donc penser que la description que donne Grolier de la comète de 1556 est influencée par une certaine tradition assez largement répandue et dont MDN avait pu avoir pris connaissance.51 On remarquera la publication en 1570, d’un ouvrage consacré à un androgyne52, lequel fait également partie de la galerie des monstres aux côtés de la comète - “monstre céleste” - dont traite à l’époque un Ambroise Paré, le médecin qui en 1559 avait été appelé pour sauver, en vain, Henri II. C’est précisément dans L’Androgyn né à Paris, le XXI Iullet MDLXX, Lyon, Michel Jove, de J. Dorat, introduit par une Epître de Jean de Chevigny, que l’on trouve une toute première mention d’une centurie et qui plus est de la “seconde centurie”, laquelle appartient au groupe des centuries ignées. Or le quatrain (II, 45) ainsi mentionné est la description du monstre ayant donné son nom au titre de l’ouvrage. Disons qu’au lendemain de la mort de MDN, la mode était aux monstres de toutes sortes et cela a aussi pu influer sur les thèmes développés par ses “successeurs”.

   Comme nous l’avons laissé entendre, notamment en ce qui concerne le recours aux guides de pèlerinages pour certaines Centuries, la mise en évidence de tels procédés rédactionnels nous semble davantage relever de faussaires que d’un auteur comme MDN. On voit mal un MDN s’amuser à repiquer certains éléments de la Préface à son fils pour constitue des Centuries alors qu’un faussaire, cherchant à recréer un certain style, y trouvera son compte. C’est pourquoi la mise en évidence de récurrences, contrairement à ce qu’affirme, non sans une certaine candeur, un L. de Luca53 est souvent plus l’indice de contrefaçons que d‘une véritable cohérence. Bien plus, il est des moyens de conférer à un ensemble hétérogène un semblant d’unité alors qu’il s’agit en fait d’un apport tardif, d’un rajout. Paradoxalement, les premières Centuries - et l’inventaire de Fontbrune (cf. supra) témoigne que le phénomène cométique est réservé à celles-ci - ne seraient pas aussi typées si elles avaient été l’oeuvre d’un “vrai” auteur, MDN ou un autre ; tout se passe pour ce que nous avons appelé les Centuries “ignées” comme si le faussaire reprenait les formules ou les tics de son modèle et y revenait inlassablement : c’est d’ailleurs bien ce qui se passe quand on va assister à un spectacle d’imitation : l’imitateur campe le personnage à singer en revenant constamment sur quelques traits marquants. Le travail du faussaire est trahi par une pente irrésistible vers la caricature de son sujet.

Jacques Halbronn
Paris, le 16 août 2003

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Date de publication
de l’Epître contrefaite à César de Nostredame

    Nous ne pensons pas que la Préface à César remaniée ait été placée dès l’origine en tête d’un lot de Centuries. Il nous semble qu’initialement celles-ci soient parues non pas sous le nom de MDN mais de l’un de ses disciples et ce peut-être bien avant sa mort en 1566, ce qui pourrait expliquer notamment une réflexion de Dorat, en date de janvier 1567, citée dans le Janus Gallicus (n° 189) concernant un quatrain 33 de la Centurie III. On sait pertinemment que le processus de publications se référant à MDN mais ne se prétendant pas pour autant de sa plume, aurait débuté dès le début des années 1560 et chacun semble s’en être accommodé. Il est également possible que MDN ait eu des collaborateurs, une sorte d’atelier comme c’était le cas en peinture, des “nègres”, d’une certaine façon, qui par la suite furent en mesure de voler de leurs propres ailes et de faire du Nostradamus meilleur que l’original.

   Dans une telle configuration, il est bien évidemment exclus que ces centuries aient été introduites par un texte signé MDN et qui plus est datant de 1555. La présence de ce texte a du coïncider avec le moment où ces Centuries furent attribuées à MDN lui-même et c’est alors que l’on chercha une épître de sa plume, quitte à la remanier de façon à annoncer les quatrains qui suivaient.

   Cette évacuation des références aux différents héritiers ou prétendus tels de MDN relève de ce que l’on pourrait appeler le syncrétisme nostradamique et c’est aussi ce qui se passera au siècle suivant avec Morgard et les sixains.54 La stratégie consistera in fine à attribuer toutes sortes de documents à MDN dès lors qu’ils étaient dans le style / genre nostradamique. Nous avons signalé également le basculement assez tentant d’un Nostradamus le Jeune à César, fils de Nostradamus : on restait dans la filiation.

   Il conviendrait donc de placer l’émergence de la préface refondue à César au début des années 1580, à la veille de la publication de l’édition à la miliade. On ne connaît, selon nous, de preuve que cette Préface à César ait introduit des Centuries avant cette date - on sait que le témoignage de Couillard de 1556, dans ses Prophéties, n’est guère concluant sur ce point mais nous renseigne sur sa première mouture - alors que nous avons le témoignage de Crespin pour l’Epître à Henri II, datée de 1558.55 Il est possible que ce soit alors que l’on ait publié la première édition prétendument datée du vivant de MDN, si l’on s’appuie sur le témoignage de Du Verdier, dans sa Bibliothèque, Lyon, B. Honorat, 1585. Elle aurait été datée de 1556 et présentée comme parue à Lyon, chez Sixte Denyse, ce qui serait logique si la Préface désormais insérée est, elle du Ier mars 1555. Cette édition n’a pas été conservée, elle comportait probablement quatre centuries pleines, tout comme la première édition des dites quatre centuries, attestée en 1572 dans les Prophéties à la Puissance Divine de Crespin56 mais sans indication d’auteur. En ce qui concerne les éditions à 353 quatrains, cela appartient à une autre “ère”, celle des centuries incomplètes, donc après 1585.57

   Nous avons déjà réfléchi sur les relations entre la dite Préface à César et le contenu des premières Centuries. Il est clair que la formule “Flambe exigue” se retrouve dans les deux textes, la Préface à César et le premier quatrain de la première Centurie.

   On pourrait nous objecter qu’il y a là une contradiction avec ce que nous venons d’exposer plus haut. Si la Préface n’a été recyclée qu’au début des années 1580, comment aurait-elle pu servir de référence pour la composition des premières Centuries ?

   A propos de ce premier quatrain, nous avons relevé par ailleurs qu’il était utilisé par Crespin mais aussi par Michel De Nostradamus le Jeune, qui le faisait carrément figurer sous son portrait.58 On pourrait évidemment supposer que ce quatrain fut inspiré par la première Préface à César, celle attestée par Crespin, lequel d’ailleurs cite cette formule.

   Existe-t-il une autre explication ? Faut-il considérer les autres recoupements que nous avons signalé comme le fait de coïncidences ? En ce qui concerne l’inspiration cométique des premières Centuries, elle semble, en effet, très proche du contenu de la dite Préface. Le problème, c’est que nous ne connaissons pas le contenu exact de celle-ci avant la période des années 1580, nous n’en disposons que d’extraits, transmis par Couillard, notamment, tout comme d’ailleurs nous ne disposons pas du texte exact des premières Centuries, sous leur forme initiale, dont nous n’avons également que des extraits.

   En fait, le seul vrai problème est le suivant : est-ce par hasard que l’on aurait placé en tête des Centuries I-IV un texte, celui de la Préface à César, qui aurait justement inspiré, des années auparavant, les rédacteurs des quatrains concernés ? Une telle coïncidence semble bien improbable. Mais on pourrait ainsi supposer que c’est la nouvelle édition des Centuries, datée de 1556, chez Sixte Denyse, qui aurait été inspirée de la Préface à César qui était désormais adjointe aux dites Centuries et cela dans le but d’authentifier celles-ci. Démarche tout à fait compréhensible puisqu’il s’agissait d’attribuer à MDN ce qui n’était pas de lui. La meilleure solution n’était-elle pas, dès lors, de greffer des éléments de la Préface à César sur certains quatrains ou d’en composer de nouveaux. Ajoutons bien entendu que la dite Préface serait remaniée pour introduire les Centuries en question. Rapprochement, donc, dans les deux sens.

   Ainsi, cela aurait été dès les années 1580 que certaines centuries auraient été présentées comme étant non seulement l’oeuvre de MDN comme c’était déjà le cas pour les centuries VIII-X, qui ne portaient pas encore alors cette numérotation. On comprend ainsi que cette édition à 4 centuries put quelque temps poursuivre une carrière parallèlement à l’édition à 1000 quatrains, qui comportait également les dites Centuries, augmentées de trois autres (V-VII) mais dans un autre cadre, avec une Epître à Henri II, une fois de plus remaniée pour introduire la “miliade”. Et c’est ainsi que cette édition allait avoir sa propre vie : en 1588, à Rouen, une édition qui se présente, c’est le seul cas connu, comme étant à 4 centuries, en son titre, mais qui ne comporte en guise de IVe centurie que quelques dizaines de quatrains, ce qui allait donner lieu à une nouvelle édition antidatée, avec la dite Préface mais cette fois avec seulement 53 quatrains à la IV, et présentée comme parue dès 1555 chez Macé Bonhomme. Si on avait conservé l’édition Sixte Denyse datée de 1556, on aurait eu une édition à 353 quatrains de 1555 suivie d’une édition à 400 quatrains de 1556. Selon une certaine logique, il était logique que l’édition abrégée précédât l’édition complète des 4 centuries.

   Cette édition datée de 1556, comportant une préface, elle, datée de 1555, sera mentionnée notamment à la fin de l’édition anversoise, chez F. De St Jaure, 159059 - ce qui était logique puisque cette édition ne comprenait que le premier volet porté à 7 centuries depuis l’édition à la miliade - puis dans d’autres éditions, à partir de 1649, comme celle des Vrayes Centuries, Rouen, avec la mention au titre “corrigées suivant les premières éditions imprimées en Avignon en l’an 1556 et à Lyon en l’an 1558”, laquelle figurera notamment dans les éditions hollandaises. Il est probable qu’il faille lire 1568 et non 1558, ce qui correspondrait assez bien à nos deux volets, l’un supposé paru avec la Préface à César et l’autre, posthume, à la mort de MDN, à moins que l’on ne se soit appuyé que sur le fait que l’Epître à Henri II, elle, était bien datée de 1558.

   On aurait donc bien quatre carrières parallèles des éditions des Centuries, chacune avec sa propre histoire :

I - L’histoire des éditions I-IV

   Elle comporte une première version à 4 centuries pleines, sous le nom de Nostradamus le Jeune (ou Mi. De Nostradamus le Jeune ou quelque nom approchant). Elle porte une date -(exacte) - et paraît au cours des années 1560. Une épître doit certainement l’introduire dont on ne connaît pas la substance.

   Elle est suivie dans les années 1580 d’une nouvelle Préface (celle retouchée de MDN à son fils César) et certains quatrains en ont été modifiés pour crédibiliser l’opération. Elle est à 400 quatrains.

   Elle va subir des modifications à la fin des années 1580, comme l’atteste l’édition Raphaël du Petit Val, 1588, sous le titre Les Grandes et Merveilleuses Prédictions de M. Michel Nostradamus divisées en quatre centuries, qui reprend vraisemblablement celui de l’édition précédente. Cette édition comporte une 4e centurie incomplète.

   Elle est rééditée, avec une centurie IV incomplète comme étant parue à Lyon ou à Avignon (selon la mention de l’édition d’Anvers), chez Macé Bonhomme, 1555.

   Pour la seconde fois, cette édition aura donc été antidatée.

2 - L’histoire des éditions I-VII

   Elle apparaît dans les années 1580 comme premier volet de l’édition à la miliade. Elle comporte alors sept centuries pleines.

   Elle va s’émanciper par rapport au second volet, bien que l’Epître à Henri II ait été remaniée pour justifier son apparition. On la retrouve, un peu plus tard ayant perdu la Centurie VII et se terminant avec la Centurie VI et le quatrain latin. Elle comporte la Préface à César mais pas l’Epître à Henri II. Cette édition n’a pas été conservée. Mais très vite, une nouvelle centurie VII se constitue, d’abord sous la forme d’une addition de 39 articles puis avec quelques quatrains supplémentaires sans que cela ne dépasse plus jamais 44 quatrains.

   Une édition antidatée à 1560 semble avoir paru comportant les six premières centuries et l’addition de 39 articles / quatrains. Elle aurait été présentée comme étant paru chez Barbe Regnault.60 C’est en tout cas la mention qui figure sur les éditions parisiennes et sur elles seulement.

   Par la suite, deux éditions antidatées à 1557, chez Antoine du Rosne seront produites, l’une à un moment où la centurie VII n’avait que 40 quatrains, l’autre après que l’on y ait ajouté 2 quatrains.

   En 1611, parait la dernière édition à 7 centuries, sous le nom de Centuries et Merveilleuses Prédictions de M. Michel Nostradamus, contenant sept centuries, dont il y en a trois cents qui n’ont encores jamais esté imprimées, Rouen, Pierre Valentin.61 Cette édition se réfère à une édition avignonnaise de 1611. A la fin de l’ouvrage, il est fait mention d’une “ancienne impression imprimée en Avignon, par Pierre Le Roux (sic) ” Il semble qu’il s’agisse d’une nouvelle version de l’édition d’Anvers de 1590, laquelle se terminait par la même référence mais en indiquant que cette impression datait de 1555. La parution d’une édition à 7 centuries en 1611 pourrait surprendre. Elle s’accompagnera en 1620 d’un Petit Discours ou Commentaire de Maistre Michel de Nostradamus, imprimées en l’année 1555, s. l.62 Nous pensons que ces deux documents, qui ignorent étrangement les centuries VIII-X témoignent de ce que des éditions à dix centuries n’étaient pas alors disponibles, ce qui situerait la parution des éditions “complétes”, dans le courant des années 1620. On ne saurait donc accepter les estimations de R. Benazra et de M. Chomarat quant à la présence de nombreuses éditions à dix centuries dans les années 1594 - 1611 ; rappelons que ces éditions qui seraient alors parues, ce que nous contestons, ne sont pas datées ou sont antidatées.

3 - L’histoire des éditions VIII-X

   Cette édition apparaît avec une Epître retouchée à Henri II, à la fin des années 1560, peut être en 1568, chez Benoist Rigaud.

   Elle n’est pas associée à l’édition des 4 premières centuries, lesquelles ne se présentent pas comme étant du même auteur.

   Elle figure ensuite au sein de l’édition à la miliade avec une Epître à Henri II à nouveau retouchée pour évoquer la miliade.

   Mal vue par les libraires parisiens qui ne veulent pas en entendre parler, sous la Ligue, elle réapparaît au cours des années 1590, au sein de deux volets63, sans que l’on puisse assurer qu’elle soit parue indépendamment du premier volet.

   Cette édition a conservé ses 300 quatrains et n’a pas été censurée - mais purement et simplement exclue - à la différence des deux précédentes éditions qui ont paru avec des quatrains en moins.

   On connaît cependant une édition ne comportant que les centuries VIII-X : Nouvelle prophétie de M. Michel Nostradamus qui n’ont jamais esté veues n’y imprimées que en ceste présente année, Dédié au Roy, Paris, Sylvestre Moreau.64

   Elle n’a jamais fait l’objet de tentatives de parution du vivant de MDN, et a conservé son statut posthume à la différence des deux précédents groupes. Contrairement à ce qu’affirme Petey Girard65, elle n’est pas plus suspecte que les autres éditions mais on ne la connaît que sous une forme tardive, au lendemain de la Ligue et au travers de quelques extraits conservés par Crespin.

4 - L’histoire des éditions I-X

   Cet ensemble ne se constitue qu’au début des années 1580, en tant que miliade de quatrains, soit 10 centuries pleines, avec l’Epître à Henri II. Très vite, cette édition est démembrée et seul son premier volet à 7 centuries poursuit une carrière chaotique. Elle ne se reconstitue qu’au début des années 1590 mais comme dans le premier cas, l’édition n’en a pas été conservée, sinon au travers des extraits qu’en donne le Janus Gallicus (1594). Elle se voit alors augmentée des Présages, à savoir les quatrains, dont certains faux, issus des almanachs de MDN mais aussi de quelques quatrains des centuries XI et XII. Elle comporte cette fois probablement les trois épîtres, à César, à Henri II et à Henri IV.

   Il faut en fait attendre le XVIIe siècle et l’époque de la régence de Marie de Médicis pour qu’une réédition de l’édition “janussienne” ait lieu, avec une nouvelle addition, celle d’une Epître à Henri IV - il s’agit d’un texte remanié datant de 1605 - suivi de sixains.

   A la suite de cela, des éditions datées de 1568 vont paraître, présentées comme étant le fait de Benoist Rigaud mais sans les Présages, les sixains ou les quatrains des Centuries XI-XII alors que ceux-ci seront conservés dans une édition, sans adresse, datée de 1605, date de l’Epître à Henri IV.

   De quand date la première apparition de la Préface à César en dehors du cadre des éditions à 4 centuries ? Il n’est pas certain qu’elle ait figuré dans l’édition à la miliade, laquelle a fort bien pu être introduite par la seule Epître à Henri II, laquelle précisément annonce un tel dispositif. Signalons que l’édition hollandaise de 1668, chez Jansson et Vebe Weyerstraet66 place, assez logiquement, l’Epître à Henri II en tête de l’ensemble du volume des Centuries et ne comporte pas la Préface à César.67 Nous pensons que cette édition a pu s’inspirer d’une mouture disparue, proche des éditions des années 1580 - 1590. Il est possible que ce ne soit que sous la Ligue que la Préface à César soit apparue en tête des Centuries I-VII, le second volet avec l’Epître à Henri II étant mis sur la touche. Par la suite, dans les années 1590, les deux Epîtres cohabiteront, toujours au nom d’un certain syncrétisme avec d’ailleurs la troisième épître et ses sixains, mais cette dernière ne se maintenant que dans les éditions troyennes de Du Ruau et Chevillot, ce dernier refusant les Présages; Pierre Rigaud, à partir de l’édition Chevillot, refusera d’intégrer ce troisième volet et conséquemment, puisqu’il en fut probablement le maître d’oeuvre, cela se répercuta sur les éditions Benoist Rigaud, 1568. Cette édition que d’aucuns s’acharnent à situer en 1568 parut, en réalité (cf. supra) plus d’un demi-siècle plus tard et est le résultat d’une lente décantation.68

Jacques Halbronn
Paris, le 2 septembre 2003

Notes

1 Cf. “Lettre critique sur la personne & sur les Ecrits de Michel Nostradamus”, Fac-similé, Cahiers Michel Nostradamus, n° 1, mars 1983, dont nous avons retrouvé un manuscrit à la BNF. Retour

2 Cf. sa “Vie du sieur Michel Nostradamus”, § VIII, pp. 28 et seq. Retour

3 Cf. notre étude concernant les publications parues à l’occasion du cinquième centenaire de la naissance de MDN. Retour

4 Cf. notre étude consacrée à ce type d’ouvrage, notamment concernant la série parue sous le nom de Moult, au XVIIIe siècle, sur le Site du Cura.free.fr. Retour

5 Cf. Concordance, p. 19. Retour

6 Cf. Clef, op. cit., p. 311. Retour

7 Cf. Concordance, p. 125. Retour

8 Cf. l’étude de P. Guinard, sur le Site du Cura.free.fr, DIAP Nostradamus. Retour

9 Cf. Concordance, p. 13. Retour

10 Cf. notre étude sur “les vraies épîtres et la datation du faux centurique”. Retour

11 Cf. Concordance, p. 197 - 198. Retour

12 Cf. Concordance, p. 179. Retour

13 Cf. “De quelques dates clairement exprimées par Michel Nostradamus dans ses Prophéties”, Prophètes et prophéties, Cahiers V. L. Saulnier, 15, Paris, Ed. E. N. S., 1998, p. 87. Retour

14 Cf. Guynaud, Concordance, p. 179 - 180. Retour

15 Cf. pp. 6 - 7 du Janus Gallicus. Retour

16 Cf. notre étude sur le RPP. Retour

17 Cf. nos études antérieures sur ce sujet. Retour

18 Cf. notre étude “les cadavres exquis des almanachs”. Retour

19 Cf. BNF, Res V 29266 Resaq. Retour

20 Cette épître est reproduite en fac-similé dans nos Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ed. Ramkat, 2002, p. 200. Retour

21 Cf. BNF, Res V 1079. Retour

22 Cf. Toussaint Renucci, Un aventurier des lettres au XVIe siècle, Paris, Didier, 1943. Retour

23 Cf. notre article sur le Site du Cura.free.fr; et J. Céard, La nature et ses prodiges. L’insolite au XVIe siècle en France, Genève, Droz, 1977, Reed. Ibidem 1996. Retour

24 Cf. “Les variations d’impact des “comètes” en France. Etude bibliographique (fin XVe -fin XVIIIe siècles) ”, La Comète de Halley et l’influence sociale et politique des astres, Bayeux, 1991, pp. 55 et 64. Retour

25 Cf. BNF, Res. pV 715 (2). Retour

26 Cf. M. Chomarat, Bibliographie Nostradamus, Baden-Baden, 1989, p. 13. Retour

27 Cf. son article sur le Site du CURA, 26. Retour

28 Cf. British Library, Tab. 597.d. 2/2. Retour

29 Cf. son édition d’une édition Macé Bonhomme, Genève Droz, 1996, pp. 37. Retour

30 Cf. RCN, pp. 90 - 91. Retour

31 Cf. BNF Res. PV 715 (1). Retour

32 Cf. notre étude et celle de Theo Van Berkel. Retour

33 Cf. BNF Res V 50090 Resaq et notre étude “Les variations des comètes etc”, op. cit., p. 57. Retour

34 Cf. BNF; V 21103. Retour

35 Cf. aussi O. Millet, “Feux croisés sur Nostradamus, au XVIe siècle”, Divination et controverse religieuse en France, au XVIe siècle, Cahiers V. L. Saulnier, 4, Paris, 1987, p. 105. Retour

36 Cf. Ed. Nostradamus, Prophéties, Paris GF Flammarion, 2003, p. 238. Retour

37 Cf. Gabriel, Grandes Ephémérides, tome Ier, 1500 - 1699; Paris, Trédaniel-La Grande Conjonction. Retour

38 Cf. nos études. Retour

39 Cf. Bib. Mun. La Part Dieu, cote 373231. Retour

40 Cf. Nostradamus, astrophile, Ottawa, 1996. Retour

41 Traduction française de Bricon, Le Livre Admirable, Paris, 1830. Retour

42 Cf. aussi notre étude sur la Préface et la prétendue humilité de Nostradamus. Retour

43 Cf. notre dernière étude sur la Préface à César, volets I et II. Retour

44 Cf. aussi notre étude sur l’ “anagaronique révolution”. Retour

45 Cf. Prophéties, 1556. Retour

46 Cf. La comète et les prophéties, Paris, Carrère-Lafon, 1986, pp. 139 - 140. Retour

47 Cf. notre étude “les Centuries comme commentaire des Epîtres“. Retour

48 Cf. notre étude sur les “cadavres exquis”. Retour

49 Cf. Bibl. De l’Ecole Nationale des Beaux Arts, fonds Masson Paris, cote 682. Voir J. P.Seguin, L’information en France avant le périodique, 517 canards imprimés entre 1529 et 1631, Paris, Maissonneuve & Larose, 1964, p. 95. Retour

50 Cf. l’édition critique de J. Céard, Genève, Droz, 1971, pp. XII et 142 et seq. Retour

51 Cf. aussi Pingré, Cométographie ou traité historique et théorique des comètes, vol. 1, Paris, 1783, p. 72 et 501 qui signale pour 1555 une comète qui évoquait “une épée dans le ciel”. Retour

52 Cf. Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, op. cit. p. 135. Retour

53 Cf. son étude sur les femmes dans les Centuries. Retour

54 Cf. nos Documents Inexploités sur le phénomène Nostradamus, Feyzin, Ed. Ramkat, 2002. Retour

55 Cf. nos Documents Inexploités, op. cit., pp. 52 - 53. Retour

56 Cf. nos Documents Inexploités, op. cit. Retour

57 Cf. notre étude les années 1580 et les deux ères centuriques. Retour

58 Cf. Prédictions des choses plus mémorables, Troyes, C. Garnier, 1571, BNF, Res R 2563. Retour

59 Cf. Bibl. Arsenal, Paris. Retour

60 Cf. Benazra, RCN, p. 51 - 52. Retour

61 Cf. Bib Ruzo, signalée in M. Chomarat, Bibliographie Nostradamus, op. cit, pp. 93 - 94, n° 173. Retour

62 Cf. BNF, Ye 7380. Retour

63 Cf. Ed. De Cahors, 1590. Retour

64 Cf. Bibl. Arsenal, Paris. Retour

65 Cf. Ed. Prophéties, GF Flammarion, Paris, 2003. Retour

66 Cf. BNF, NUMM 70545. Retour

67 Cf. Benazra, RCN, p. 242. Retour

68 Cf. Documents Inexploités sur le phénoméne Nostradamus, op. cit., p. 172. Retour



 

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